JEAN GUAY AU CANADA

Jean Guay naquit en 1626, à Breneuil, aujourd'hui Berneuil, petite localité située à 13 kilomètres de Saintes, capitale de l'ancienne province de Saintonge. Berneuil est aujourd'hui une commune de quelque 1000 habitants, qui fait partie du département de la Charente-Inférieure. Elle est située dans des collines à 5 kilomètres de la Seugne, rivière limpide du département de la Charente-Inférieure.

Le Département de la Charente-Inférieure est divisé en six arrondissements; La Rochelle, Jonzac, Marennes, Rochefort, Saintes et Saint-Jean d'Angely. Berneuil, place natale de Jean Guay est comprise dans l'arrondissement de Saintes. Ce dernier arrondissement est divisé en huit cantons. Berneuil fait partie du canton de Gémozac. L'église de Berneuil, placée sous le patronage de Notre-Dame est très ancienne. Et c'est là même que fut baptisé Jean Guay.

Jean était le fils de Jean Gué ou Guyet ou Guiet et de Marie Dumont. Nous verrons plus tard comment son patronyme fut changé de Gué ou Guyet à Guay.

L'histoire ne nous renseigne pas sur ce qu'étaient ces gens. Étaient-ils des paysans ? Cela est tout à fait possible. Toutefois, on peut affirmer que Jean était menuisier, car c'est en cette qualité qu'il émigra au Canada, sous la coupole des Jésuites. Mais pourquoi émigra-t-il en Nouvelle-France ?

Or nous savons qu'à cette époque, la France était aux prises avec de sérieuses difficultés financières. De nouvelles taxes étaient levées, ce qui rendait la vie très difficile pour les citoyens.

Au XVIe siècle, la France eut à faire face à plusieurs guerres, dont 8 guerres de religion entre 1562 et 1593. En fait, cette période a vu l'état de guerre à peu près continuel, interrompu seulement par de courtes trêves qu'on a décorées du nom de paix. Celles-ci n'étaient déterminées moins par la lassitude des combattants que par le manque d'argent. Également, durant cette période, il y avait lutte entre deux grandes familles rivales pour la couronne de France, les Guises et les Bourbon. C'est ainsi que les Guerres de Religion devinrent des guerres politiques.

À ces luttes civiles, se joignirent des couronnes étrangères : Philippe II d'Espagne soutenait les Guises tandis qu'Élisabeth d'Angleterre et les princes allemands appuyaient les huguenots. On vit même des troupes anglaises au Havre, une garnison espagnole à Paris, et même une petite armée pontificale en Poitou. Ces guerres furent atroces et les campagnes furent horriblement maltraitées. "Il n'y a pas un coin de terre qui ne soit ravagé" écrivait un contemporain.

En 1593, Philippe II roi d'Espagne, espérant réunir la France à son royaume se proposa en "protecteur de l'état de religion du royaume de France". Sentant bien ce jeu, l'on convoqua les États Généraux en janvier 1593. Philippe II posa la candidature de l'infante espagnole au trône de France. Entre la domination étrangère et un prince français tel que Henri IV, les députés ne purent hésiter.

À la suite de la conversion d'Henri IV roi de France, une paix précaire s'installa en France. Pour s'attirer les bonnes grâces du Vatican, il rappela en France les Jésuites qui en avaient été expulsés à la suite d'un attentat et leur confia même le Collège de la Flèche.

Après avoir pacifié son royaume, Henri IV dut constater que l'économie du pays était en ruine. Les finances étaient en piteux état et le roi se trouvait sans argent et sans crédit. Il n'y avait ni commerce ni industrie dans les villes et les villages étaient dépeuplés, les paysans se révoltaient. On dut attendre une dizaine d'années pour revoir la prospérité en France.

À l'extérieur, le commerce français se releva. Au Canada, l'on reprit la colonisation. Champlain fonda Québec en 1608 et remonta le Saint-Laurent jusqu'aux Grands-Lacs.

Pendant ce temps, Henri IV soutint les princes protestants contre l'empereur de l'Allemagne, Rodolphe II. Henri IV fut assassiné le 14 mai 1610 avant que la guerre contre l'Allemagne ne fut déclarée. Louis XIII, son fils aîné lui succéda à l'âge de 9 ans.

Sous les règnes de Louis XIII (1610-1643) et Louis XIV (1643-1715) on vit réapparaître les désordres qui dégénérèrent en guerres civiles. On vit alors les éléments habituels de troubles : grands seigneurs épris d'indépendance, Huguenots à tendances séparatistes, Parlement et villes hostiles au pouvoir absolu.

En France, vers 1614, l'armée protestante était évaluée à 40,000 gentilshommes auxquels il fallait ajouter 30,000 hommes de troupes. La guerre éclata à propos du Béarn. Louis XIII exigeait l'exécution de l'Édit de Nantes dans ce pays où les Huguenots, qui étaient les plus forts, avaient jusqu'alors refusé aux catholiques la restitution des biens d'Église et la parité du culte. Bravant l'ordre du roi, l'Assemblée des Réformés, tenus à LaRochelle, souleva le Midi, soit le pays de Jean Guay.

En 1622, le roi accorda aux Réformés (protestants) la Paix de Montpellier, qui confirmait l'Édit de Nantes. En 1624, le roi s'adjoignit le cardinal Richelieu. En 1627, la guerre éclata entre le roi et ses sujets calvinistes à l'instigation de l'Angleterre. Celle-ci, mécontente de la politique de Louis XIII en Italie, saisit sur mer des vaisseaux français et envoya à La Rochelle une flotte commandée par le duc de Buckingham. Richelieu entreprit lui-même le siège de La Rochelle. Au bout d'une année de siège, la famine devint horrible dans La Rochelle, la ville dépeuplée se rendit au roi de France, le 1er novembre 1628. La guerre contre les protestants se continua dans les Cévennes jusqu'en 1629, le 28 juin, alors que le roi accorda aux Réformés la Paix de Grâce.

Suivit des intrigues contre Richelieu, ainsi que d'autres conflits. Le roi Louis XIII mourut le 14 mai 1643 à l'âge de 42 ans. Pendant ce temps le désordre existait dans les finances publiques. C'est ainsi que les impôts furent augmentés, ce qui incita à plusieurs révoltes.

Telle était la situation dans le pays à l'époque où Jean Guay prit la décision d'émigrer au Canada. On peut certes s'imaginer que pour lui, devant la misère qui régnait, les impôts, le danger d'être forcé de joindre le rang des combattants de ces guerres interminables, la décision de tenter l'aventure canadienne ne fut pas difficile à prendre. Existait-il d'autres raisons qui auraient poussé un gars de 20 ans à quitter son pays ?

Des vieux de son pays, sans élaborer, laisseront entendre que, peut-être était-il de ces jeunes que l'on appelait les révoltés.

C'est ainsi que sous les auspices des Jésuites, il s'embarqua à La Rochelle sur "Le Cardinal" le 18 juillet 1646. Cette nef avait comme maître le Sr. De Repentigny. M. De Repentigny accosta son bateau à Québec le 23 septembre, 2 mois et 5 jours après son départ de France, durée raisonnable pour cette traversée. Toutefois un certain C. de Rochemontoix a peut-être raison d'écrire que le Sr. De Repentigny quitta La Rochelle le 13 juin. En effet, aux registres de N.D. Québec, le 27 septembre 1646, eut lieu le baptême de J.B. Trottier "né en mer depuis 2 mois sur un voilier venant de la Gaule"Son parrain est le jeune fils de l'amiral de la flotte et du directeur de la Communauté des Habitants, J. B. Legardeur et sa sœur Marguerite. La durée de la traversée aurait ainsi été de 3 mois et demi, ce qui laisse entendre qu'elle aurait été très difficile et longue.

En effet, si la durée du voyage de Champlain en 1610 avait été de dix-neuf jours, par contre, d'autres voyages durent plus de trois mois. La route du retour en France est plus facile et plus calme, étant donné la permanence des vents d'ouest.

Fin septembre 1646, le R.P., Lalemant, à Québec, écrivait dans son journal, les faits marquants du mois et de l'année : " ceux donc qui arrivèrent cette année, outre le P. Quentin furent le P. Daran, le P. Gabr. Lalemant…" pour les Hurons, Desforges, Pierre Tourmenta, masson, Jean Guiet, menuisier, Fr. Gouaut, Apotq. Et le dit Sr. De Laubiniere…"

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